04/06/2007

La conférence de Wannsee

La conférence de Wannsee, qui se tint dans un faubourg de Berlin le 20 janvier 1942, réunit 15 des plus hauts responsables militaires et civils du IIIème Reich. Elle décida des moyens techniques, financiers et administratifs de la Solution finale au problème juif. Voici la liste des 15 participants :

  • Reinhard Heydrich, SS-Obergruppenführer, chef du RSHA (Office central de la sécurité du Reich)
  • Adolf Eichmann, SS-Obersturmbannführer au RSHA, chef du département B-4 de la Gestapo, responsable de la logistique de la Solution finale
  • Dr. Josef Bühler, secrétaire d'État et premier adjoint du Dr. Hans Frank dans le Gouvernement Général (c.à d. la Pologne)
  • Dr. Georg Leibbrandt, secrétaire d'État au Ministère des territoires de l'Est occupés
  • Martin Luther, sous-secrétaire d'État au Ministère des Affaires étrangères
  • Dr. Roland Freisler, secrétaire d'État au Ministère de la Justice
  • Dr. Alfred Meyer, secrétaire d'État au Ministère du Reich
  • Heinrich Müller, SS-Gruppenführer, chef du département IV (Gestapo) du RSHA
  • Otto Hofmann, SS-Gruppenführer au Bureau central pour la Race et la Colonisation, département du RSHA
  • Erich Neumann, secrétaire d'État au Bureau du plan quadriennal
  • Dr. Gerhard Klopfer, SS-Oberführer à la Chancellerie du Parti, dirigée par Martin Bormann
  • Dr. Karl Schöngarth, SS-Oberführer, commandant le SD dans le Gouvernement Général
  • Friedrich Wilhelm Kritzinger, de la Chancellerie du Reich
  • Dr. Wilhelm Stuckart, secrétaire d'État au Ministère de l'Intérieur
  • Dr. Rudolf Lange, SS-Sturmbannführer, commandant le SD en Lettonie

Cette rencontre de secrétaires d'État, qui dura environ une heure et demie, était prévue d'abord pour le 9 décembre 1941, puis avait été repoussée pour cause d'entrée en guerre imminente des Etats-Unis. Le 20 janvier 1942 donc, c'est avec enthousiasme que les quinze participants programment la mort des 11 millions de juifs dénombrés par eux sur le Vieux Continent (Angleterre et Espagne inclus). A Wannsee, c'est une action à long terme qui se trame, d'une portée historique inouïe, et non plus un pogrom ni une opération punitive à grande échelle.

Le principal responsable: Reinhard Heydrich

Dans les mois qui précèdent l’invasion de l'Union Soviétique, Heydrich mène d’intenses négociations avec des responsables de l’armée afin de mieux coordonner l’action des Einsatzgruppen avec les opérations militaires[22]. Vu l’ampleur du conflit qui se prépare, les difficultés rencontrées en Pologne ne peuvent se répéter. Un accord est finalement conclu afin de définir avec précision les missions des uns et des autres, ce qui n’empêche ni les tensions, ni les contradictions.

Quatre Einsatzgruppen sont formés, dont deux sont dirigés par de proches collaborateurs d’Heydrich :Arthur Nebe[], chef du bureau V (police judiciaire ou « Kripo ») pour le groupe B et Otto Ohlendorf, chef du bureau III (SD Ausland) pour le groupe D ; le groupe A est dirigé par Franz Walter Stahlecker, le groupe C par Ott Rasch. Désignés par Heydrich sans être volontaires, ils accompliront leur tâche avec une redoutable efficacité.

Comme en Pologne, mais sur une bien plus vaste échelle, les quatre groupes s’engouffrent dans le sillage des armées allemandes dès le début de l'opération Babarossa et procèdent à l’élimination systématique des cadres du parti communiste, surtout s’ils sont Juifs, des commissaires politiques de l’Armée rouge, des partisans et supposés tels, de ceux qui les abritent et les soutiennent ou sont soupçonnés de le faire.

À la fin du mois de juillet 1941, l’action s’étend à tous les Juifs, hommes, femmes et enfants. Il n’est plus nécessaire d’être un opposant réel ou potentiel : le fait d’être Juif suffit pour être exécuté. Le plus terrible des massacres est perpétré par l'Einsatzgruppe C, à Babi Yar , près de Kiev, les 29 et 30 septembre 1941, au prix de près de trente-quatre mille victimes.

Fin août ou début septembre, Heydrich confirme lors d'un entretien avec Eichmann que « le Führer a ordonné l'extermination physique des Juifs[24] ».

Afin d’accélérer l’extermination des Juifs, mais aussi d’épargner les nerfs des tueurs, les premiers camions à gaz, déjà utilisés en Allemagne pour l’extermination des malades mentaux, font leur apparition sur le front de l’Est en décembre 1941. Le 7 décembre 1941, les premiers gazages sont organisés dans le camp d'extermination de Chelmno, seul camp administré par la Sipo. Les autres camps d'extermination et les camps de concentration ne relèvent pas de l'autorité d'Heydrich, mais de celle d'Himmler, via le « Wirtschafts-Und Verwaltungs-Hauptamt », dirigé par Oswald Pohl. Après l’organisation des Einsatzgruppen, aux activités desquelles il n’assistera jamais mais dont il suit les résultats de manière constante, Heydrich est le maître d’œuvre de la conférence de Wannsee du 20 janvier 1942, qui planifie la solution finale et dont le secrétariat est assuré par Adolf Eichmann.

« Tous les Juifs seraient déportés vers l'est comme main d'œuvre. La plupart disparaîtraient par élimination naturelle. Les survivants, les plus résistants, seraient traités en conséquence car aucun Juif ne pouvait survivre pour constituer la cellule reproductrice d'une nouvelle reconstruction juive. »
Reinhard Heydrich, 20 janvier 1942[25]

C'est à la suite de cette conférence et conformément aux instructions d'Heydrich qu'est ensuite lancée l’opération Reinhart, soit l’élimination systématique de tous les Juifs de Pologne et de la Russie d’Europe[26].